C’était hier. De l’eau a depuis coulé sous les ponts. Sous ces ponts qui enjambent l’Ill. Dont les Alsaciens et les Mosellans voudraient également qu’ils traversent davantage le Rhin.
Il y a 7 ans, la place de Bordeaux accueillit ce 11 octobre 2014 des milliers d’Alsaciens qui clamaient leur colère.
Leur colère d'être, une fois de plus, les victimes de décisions arbitraires, infondées et échappant à tout contrôle populaire.
Ce 11 octobre, se manifesta la dernière révolte d’ampleur d’un peuple qui ne voulait pas disparaître de la carte française. Cette colère était tout alsacienne, pour le meilleur et pour le pire : elle s’exprima de manière festive et dans une ambiance bon enfant. Rétrospectivement, l’on peut affirmer sans crainte d’être démenti qu’elle était d’une extraordinaire ingénuité.
Ce jour aurait pu marquer le début d'une fronde populaire. D'une fronde qui aurait pu avoir ses meneurs. Il y a 7 ans, l'ensemble des élus alsaciens jurait en chœur, la main sur le cœur, qu'ils ne voulaient pas de cette réforme qui s'inscrivait à rebours du bon sens. Chacun souscrivait à cette analyse, chacun fondait ses espoirs dans ces hommes et femmes qui firent serment de ne point se séparer tant que l'Alsace serait menacée de disparition du paysage institutionnel.
L'auteur de ces lignes, fort de sa naïveté mâtinée de confiance excessive dans la parole donnée, alla même congratuler Philippe Richert pour son action en haut lieu en faveur de la région. Il y aurait tant à dire sur cette trahison. Sur cette nouvelle trahison des clercs qui ajouta à la défiance démocratique qui affectait déjà notre pays.
Depuis, nous appartenons tous à l’espèce grand-estienne. Nos jeunes chérubins l’apprennent d’ailleurs à l’école. L’Alsace est passée de mode et il est de bon ton de cacher l’amour qu’on lui voue. L’Alsace n’a plus droit de cité. Seuls les bretzels peuvent s’afficher fièrement, sans être sommés de faire repentance.
Depuis, une nouvelle institution est née, dont les contours épousent la terre entre Rhin et Vosges. Mais en réalité, rien n'a vraiment changé. Je me demande même si cette réforme territoriale n'a pas enfanté le chant du cygne d'un peuple qui ne voulait pas mourir et qui aujourd'hui sait qu'après quelques mutineries, son heure sonnera. Un peuple qui, de toutes façons, allait tôt ou tard subir l’épreuve du rouleau compresseur qui broie et coupe les têtes singulières, au-dessus de la mêlée.
Je crois aujourd’hui que cette réforme a représenté une œuvre de salut public pour une génération qui a décidé de prendre son destin en main et d’assumer son alsacianité.
Du péril a accouché le salut.
Saisissons l’occasion, retroussons-nous les manches et reconstruisons l’Alsace que nous voulons à notre image, Alsaciens et Elsässer.
Demain Unser Land !