CETA : Et si la Wallonie venait d'inventer le fédéralisme à 3 niveaux (Nation/Etat/Europe)?

Vendredi dernier 14 octobre, le Parlement wallon a décidé d'envoyer dans les limbes le CETA, l'accord de libre-échange entre l'UE et le Canada censé être signé en grandes pompes le 27 octobre prochain à Bruxelles, lors d'un sommet extraordinaire EU-Canada. Par la même occasion, la ''petite Wallonie'' a peut être inventé le nouveau fédéralisme européen!

 

 

 CETA, un accord mixte!

 

 

Le traité de Lisbonne est clair : le commerce international est une compétence exclusive de l'Union. La Commission européenne, (le gouvernement européen), négocie au nom de l'Union, sur la base d'un mandat donné par les Etats membres, le Conseil. A la fin du processus, l'accord est ratifié par une majorité qualifiée d'Etats (55% des Etats membres représentant au moins 65% de la population de l'UE) et une majorité qualifiée du Parlement européen (majorité absolue des membres qui le composent, soit au moins 376 sur 751). Malheureusement aujourd'hui, il existe une majorité solide en faveur de ces accords de libre échange, car les conservateurs, les libéraux et les socialistes possèdent une solide majorité au Parlement européen et une quasi unanimité au Conseil.

 

Mais alors pourquoi la ''petite Wallonie'', (mais aussi le Parlement de la communauté francophone de Belgique : la ''Fédération Wallonie-Bruxelles'' pour être précis), a pu, à elle toute seule, bloquer le CETA? Tout simplement parce que le CETA n'est pas un accord commercial classique. C'est un accord mixte! Comprenez qui mélange des matières dont l'Union est compétente et des matières dont les Etats membres, voire les régions/nations sans Etat dans les Etats fédéraux, sont compétents. Dès lors, l'uanimité au Conseil est la règle et les Parlements des Etats, voire des régions/nations dans les pays fédéraux, doivent ratifier l'accord conclu. Or, en Belgique, les différents Parlements (Parlement fédéral, Parlement de Flandres, Parlement de Wallonie...) doivent donner le feu vert au gouvernement fédéral pour signer l'accord. La Flandre, gouvernée par une majorité libérale, a validé l'accord et donné son feu vert, la Wallonie, gouvernée par une majorité progressiste, a refusé de donner un blanc seing.

 

Dès lors, il ne peut y avoir de débat sur : « Est-ce que la Wallonie peut, à elle toute seule, tout bloquer ? » Elle en avait la compétence, le gouvernement wallon a respecté le vote du Parlement wallon qui ne voulait pas du CETA, il a été cohérent avec sa ligne politique et a défendu son peuple. Mieux, en rejetant le CETA, le Parlement wallon a défendu aussi l'intéret de millions d'Européens qui ne voulaient pas du CETA mais qui n'avaient pas été entendus par les soi-disant ''progressistes", qu'ils se nomment Hollande en France, Renzi en Italie ou Tsipras en Grèce. Mais on peut redouter des pressions énormes sur le Gouvernement Wallon tant les socialistes européens, et Martin Schulz, le Président socialste du Parlement européen, veulent ratifier le CETA

 

 

Une absence totale de transparence

 

Mais au-delà de la position du gouvernement wallon, ce qui est criant dans les accords commerciaux négociés par la Commission européenne, c'est que personne ne sait ce qu'il y a dans l'accord commercial!

 

L'absence totale de transparence est la marque de fabrique de cette Europe gouvernée par les conservateurs, les libéraux et les socialistes. Réunis au Conseil, ils négocient entre eux un mandat de négociation dans l'obscurité absolue. Puis, la Commission européenne négocie, en catimini, sans que les citoyens sachent ce qui se discute, voire ce qui se brade. Même les parlementaires européens, élus au suffrage universel direct, n'ont pas accès librement aux négociations. En effet, ils sont réduits à aller dans des ''salles de lecture'', sans avoir le droit de prendre des notes, des photos ou d'enregistrer quoi que ce soit.

 

Enfin, à la fin des négociations, la Commission européenne impose son argument suprême : ''le fait accompli'' et déroule sa propagande ultralibérale. ''Le libre-échange, c'est bon pour la croissance, c'est bon pour l'emploi, c'est bon pour nous, ne lisez pas l'accord, il faut voter et vite''.

 

C'est pourquoi il faut, de toute urgence, revisiter les règles européennes. La Commission devrait être contrôlée par le Conseil et le Parlement européen, et non seulement par ce premier, et le mandat devrait être décidé par les 2 institutions, le tout, dans une transparence absolue, tant le déficit démocratique et de confiance est grand.

 

 

Une nouvelle structure institutionnelle

 

Mais ce qu'il y a d'intéressant dans l'affaire du CETA et de la Wallonie, c'est qu'un Parlement d'une région a eu son mot à dire sur un dossier européen. Il était compétent, il s'est exprimé, son vote doit être respecté.

 

Cela ne devrait pas arrivé seulement en Belgique parce que c'est un Etat fédéral,( comme quoi une Monarchie constitutionnelle peut être plus démocratique qu'une République une et indivisible), mais ce devrait être la norme partout en Europe.

 

Il est temps d'instaurer un fédéralisme à 3 niveaux (Nation/Etat/Europe) où chaque niveau a son propre Parlement élu démocratiquement, son propre Gouvernement responsable devant lui, ses propres compétences législatives et sa propre fiscalité. Un vrai fédéralisme au service des peuples, une autre Europe au service des citoyens.

 

Car c'est en le rendant plus démocratique, plus simple, plus clair et surtout plus proche des peuples que nous parviendrons à redonner du sens au projet européen et à lui rendre l'assentiment des peuples. 

 

En attendant, la Wallonie a porté haut et fort la voix des peuples qui ne voulaient pas du CETA et elle a ouvert la voie d'une Europe des peuples!

 

Roccu GAROBY

 

Vice-Président de l'Alliance Libre Européenne-Jeune