Parlement européen: Socialistes, droite et extrême droite, main dans la main pour empêcher la publication de nouveaux scandales!

Jeudi 14 avril 2016, le Parlement européen a adopté définitivement la directive européenne sur le secret des affaires. En plein ''Panama Papers’', les socialistes, la droite et l'extrême droite ont honteusement décidé de protéger encore et encore ces scandales en rendant leur publication plus difficile.

 

Une directive européenne

 

En droit européen, une directive est un texte contraignant, une ''loi européenne'', qui doit être transposée, ''traduite'', en droit national dans un certain délai, généralement quelques années. Lors de la transposition en droit national, l'Etat membre a la possibilité d'adapter le contenu de la directive à ses propres contraintes ou spécificités mais dans les limites établies et définies dans la directive elle-même. Ainsi, l'Etat membre peut transposer une version amoindrie ou, au contraire, très contraignante de la directive. 

 

Pour simplifier, une directive est un cadre législatif qui s'applique à tous les peuples de l'Union européenne mais dans lequel les Etat membres ont une marge d'appréciation pour tenir compte de leurs spécificités.

 

Les directives s'opposent donc aux règlements européens qui, eux, sont d'application directe. Les règlements s'appliquent immédiatement après leur publication au Journal Officiel et sur l'ensemble du territoire de l'Union sans modification possible de la part des Etats membres.

 

''Le secret des affaires''

 

Le nom exact de la directive proposée en 2013 par la Commission européenne et qui vient d'être adoptée est la ''directive du Parlement européen et du Conseil sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites''. Un nom bien technocratique pour masquer le principal élément de la directive qui est de protéger le ''secret des affaires''.

 

En effet, le but premier de ce texte législatif, du moins officiellement, présenté en novembre 2013 par la précédente Commission européenne et le Commissaire français Michel Barnier, était de protéger les Petites et Moyennes Entreprises (PME) afin qu'elles puissent se défendre contre l'espionnage industriel et/ou le vol d'informations confidentielles. En effet, les PME manquent souvent de moyens financiers, humains et légaux pour se protéger contre les multinationales qui leur pillent leur savoir et savoir-faire; leur font une concurrence fiscale déloyale en recrutant une armada de conseillers fiscalistes afin de payer le moins possible d'impôts; et ont accès aux arcanes du pouvoir pour influencer les textes dans leurs propres intérêts.

 

Mais l'intention politique première, qui était louable, n'a jamais été traduite concrètement dans le texte proposé par la Commission européenne. Cet argument était un cache-sexe pour pouvoir protéger les plus grandes multinationales. Et pour cause, ce sont les plus grandes entreprises du monde mais aussi européennes, et notamment françaises, qui ont soufflé l'idée à la Commission européenne et ce sont les plus puissantes, notamment les grands groupes banquiers, qui se sont engoufrées dans la brèche pour protéger non pas ''le secret des affaires'' mais ''le secret de leurs affaires''.

 

En réalité, jamais les PME, pourtant nommées à chaque discours offciel, n'ont été l'objet de ce texte. En les mettant en avant, la Commission européenne voulait simplement faire passer la pilule inavouable : ''protéger les grandes entreprises'' et ''rendre plus difficile la découverte de nouveaux scandales'' du type ''Panama papers''.

 

Protéger les lanceurs d'alerte

 

Le texte initial voulait interdire aux journalistes de faire leur travail et de protéger leurs sources en cas de publication d'informations confidentielles. Quant aux lanceurs d'alerte, ceux qui ont rendu publiques les affaires comme Wikileaks, les écoutes de la CIA, Panama papers, la Commission voulait qu'ils soient poursuivis en justice!

 

La version finale adoptée exempte, heureusement, les journalistes. Ils ne pourront pas être poursuivis! Mais elle ne protège pas les lanceurs d'alerte qui seront sous la menace directe de la Justice. Et pourtant, c’est grâce à eux que la lumière est faite sur le comportement de cette élite de plus en plus déconnectée de la réalité.

 

La majorité pro-opacité

 

Jeudi 14 avril, les socialistes européens et l'ensemble de la droite (des libéraux aux conservateurs en passant par les chrétiens-démocrates) mais aussi l'extrême-droite, y compris le FN, ont voté ensemble le texte proposé par la Commission eurpéenne rendant encore plus difficile la divulgation de scandales politiques tels que les ''Swissleaks'', ''Luxleaks'', ''Panama papers''...

 

Au Parlement européen, seuls l'Alliance Libre Européenne (ALE), les Verts européens et l'extrême-gauche (GUE) ont voté en bloc contre considérant, à juste titre, que la protection des PME est une nécessité, mais qu’elles sont les ‘’cocues’’ de l'histoire car il n'est pas question d'elles, dans ce texte. De plus, celui-ci protège plus les multinationales qui contournent l'impôt, voire détournent illégalement de l'argent ou parfois même en blanchissent!

 

C'est donc avec 503 voix pour, 131 contre et 18 abstentions que le texte a été adopté. Encore une fois, les socialistes européens se vautrent dans l'ultralibéralisme qui veut que toute part de lumière ne soit pas la bienvenue.

 

Roccu GAROBY

 

Vice-Président de l'Alliance Libre Européenne Jeune